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lunes, 30 de julio de 2012

Pourquoi la France se voit condamnée à rembourser les Témoins de Jéhovah

 

http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/France/Pourquoi-la-France-se-voit-condamnee-a-rembourser-les-Temoins-de-Jehovah-_EP_-2012-07-26-835623/(CRX_ARTICLE_ACCESS)/ACCESS_CONTENT

 

 

Le litige qui oppose depuis plus de quinze ans l'État français aux Témoins de Jéhovah (TJ) concernant la taxation des dons vient de connaître un nouveau rebondissement. Dans un arrêt du 5 juillet, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a jugé que la France devait rembourser à l'association la somme de 4,5 millions d'euros, « indûment payée au Trésor public »,  ainsi que 55 000 € « pour frais et dépenses » .

 

Cette décision est la suite logique d' un précédent arrêt du 30 juin 2011, qui pour la première fois, avait statué que la France, en taxant les dons (hors immobilier) reçus par les Témoins, s'était rendue coupable d'une violation de la liberté de religion. L'État a trois mois pour faire appel.

Dès 1997, l'administration s'intéresse aux « offrandes »

 

Retour en arrière. Fin 1995, au moment de la publication du rapport parlementaire sur « les sectes en France »,  qui cible entre autres les Témoins de Jéhovah, ceux-ci font l'objet d'un contrôle fiscal. S'il conclut au caractère non lucratif des activités des TJ, ce contrôle n'en marque pas moins le début d'investigations plus poussées.

 

Début 1997, l'administration fiscale s'intéresse aux « offrandes »  reçues par la communauté entre 1993 et 1996 et met celle-ci en demeure de déclarer ces dons, soumis à une taxation de 60 %. Refus des TJ, qui font valoir qu'ils bénéficient des exonérations reconnues aux associations cultuelles et aux congrégations religieuses. Mais le fisc ne l'entend pas de cette oreille. Dès l'année suivante, il leur réclame la somme de 45 millions d'euros.

 

C'est le début d'une longue bataille judiciaire. En 1999, les Témoins saisissent les tribunaux. Par trois fois, ceux-ci vont leur donner tort. Définitivement déboutés par la Cour de cassation, ils se résolvent à régler au fisc une première ardoise de 4,5 millions d'euros. Puis plus rien. Dès lors, la direction des impôts va réclamer chaque année à ce contribuable peu zélé les sommes dues. Qui se monteront en 2011, avec les pénalités de retard, à 59 millions d'euros.

Un redressement fiscal jugé "imprévisible"

 

Mais les Témoins de Jéhovah ne désarment pas. Ils ont introduit une requête devant la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), invoquant l'article 9 de la Convention européenne, qui protège la liberté de religion (1). La taxation des dons manuels qui frappe la communauté porte atteinte, argue-t-elle, à son droit d'exercer sa liberté de religion, garantie par cet article.

 

En juin 2011, la CEDH donne raison à l'association. Motif principal : le redressement fiscal qui lui a été appliqué était « imprévisible »,  car s'appuyant sur une loi mal rédigée. Or si le libre exercice d'une religion peut faire l'objet de restrictions, encore faut-il que celles-ci aient été « prévues par la loi » . Et de conclure à la violation, par la France, de l'article 9.

 

À ce moment-là, la France n'est pas encore condamnée. Une transaction amiable est encore possible. Le gouvernement accepte de renoncer aux pénalités de retard, soit 40 millions d'euros. Les Témoins refusent. La Cour reprend donc la main et le 5 juillet dernier, condamne la France à rembourser aux Témoins de Jéhovah la somme qui avait déjà été recouvrée par l'impôt, soit 4,5 millions d'euros.

Trois mois pour saisir la Grande Chambre

 

Le gouvernement a encore la possibilité de saisir le degré de juridiction supérieur, la Grande Chambre de la CEDH, dans un délai de trois mois. Va-t-il le faire ? « À ce stade, nous n'avons pas de position arrêtée,  indique le porte-parole du Quai d'Orsay, Bernard Valéro. Nous allons analyser l'arrêt, étudier de près la formulation utilisée par la cour, puis nous verrons. » 

 

Selon un connaisseur du dossier, la Grande Chambre pourrait « faire une analyse différente »  de celle de la chambre. Mais rien ne le garantit. Les conséquences de l'arrêt seraient alors non négligeables. Car dans sa décision, la Cour consacre un paragraphe aux 59 millions qui constituent l'objet principal du litige. « La renonciation à la recouvrer  (cette somme, NDLR) constituerait une forme appropriée de réparation »,  indique le jugement à l'adresse du gouvernement.

 

(1)    Selon l'article 9, « toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion » .

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