Comme plusieurs, j'ai failli m'étouffer en consultant la position de la Commission des droits de la personne sur la Charte des valeurs québécoises. Dans un document adopté le 16 octobre puis publié le 17 octobre, la Commission explique sa position : elle est contre une modification de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, contre une hiérarchisation des droits, contre une clause interprétative favorisant l'égalité homme-femme, contre l'interdiction d'afficher sa religion pour les employés de l'État, etc.
Bref, la Commission n'est pas seulement contre une partie du projet de Charte du Parti québécois, elle est contre tous ses éléments. Selon le document, nous pouvons comprendre que le Parti libéral, la Coalition avenir Québec, le rapport de la Commission Bouchard-Taylor et les nombreux autres groupes s'étant prononcés contre des éléments de la Charte vont trop loin puisqu'ils appuient la majorité des éléments du projet de Charte.
Hiérarchisation des droits
Voici ce qui est écrit dans le document publié par la Commission : « Aucun droit n'est plus important que les autres ». La Commission s'oppose farouchement à la hiérarchisation des droits, affirmant essentiellement que le système actuel fonctionne bien puisque les juges ont à trancher lorsque des conflits éclatent entre divers droits. Ainsi, lorsque l'égalité homme-femme entre en contradiction avec la religion, des juges peuvent se réunir afin de trouver un compromis ou trancher d'un côté ou de l'autre. Dans un tel cas, un compromis impliquerait une atteinte partielle à l'égalité homme-femme afin de la concilier avec la religion, tandis que parfois la religion pourrait prévaloir sur l'égalité homme-femme. Est-ce vraiment acceptable? N'est-ce pas une évidence même que l'égalité homme-femme doit prévaloir sur des croyances (et souvent simplement des caprices) religieuses? La Commission des droits de la personne répondra que non, ce ne l'est pas et qu'il faut tenir compte de la sincérité de la croyance.
Que dire alors du droit à la vie et à la sécurité? Des Témoins de Jéhovah laissent parfois leur enfant mourir, car ils ne veulent pas qu'il reçoive de transfusion sanguine et un médecin qui irait contre leur volonté s'exposerait à de graves conséquences. La société québécoise serait pratiquement unanime pour affirmer que le droit à la vie d'un citoyen doit prévaloir sur n'importe quelle règle religieuse, idem pour l'égalité homme-femme. La position de la Commission revient à dire que les juges tranchent toujours du bon côté, mais la réalité est que plusieurs décisions sont rendues sans recevoir l'unanimité, ce qui prouve que même les juges ne sont pas tous d'accord sur les jugements rendus. Pourquoi alors s'opposer à la hiérarchisation des droits en prétendant que les juges prennent toujours la bonne décision?
Et pourtant...
Alors que la Commission s'insurge contre l'idée d'instaurer une hiérarchisation des droits, elle semble pourtant elle-même favoriser la liberté d'expression religieuse par rapport à la liberté d'expression politique. En effet, la Commission dénonce l'idée d'interdire les signes religieux ostentatoires pour les employés de l'État, mais ne glisse aucun mot contre l'interdiction d'afficher ses croyances politiques pour nos fonctionnaires. La Commission affirme qu'il « n'est pas raisonnable de présumer de la partialité d'un employé de l'État du simple fait qu'il porte un signe religieux ». Ne pourrions-nous pas dire la même chose pour le fonctionnaire qui porterait un carré rouge? Ou pour le fonctionnaire qui porterait un macaron où il est écrit « Je suis indépendantiste »? En quoi est-ce différent? Est-ce que la Commission trouve raisonnable de présumer de la partialité d'un fonctionnaire s'affichant pour une idée ou une politique?
Le hijab, par exemple, n'est pourtant pas une obligation religieuse dictée par le Coran, mais plutôt un moyen d'expression pour plusieurs musulmanes (et une obligation sexiste dictée par des religieux pour d'autres : allez à la fin de mon texte pour plus d’informations). Il s'agit donc d'un moyen d'afficher ses convictions. Pourquoi serait-ce plus acceptable pour une fonctionnaire d'afficher « Je suis musulmane » que d'afficher « Je suis souverainiste »? Est-ce vraiment déraisonnable de croire que oui, un individu d'une minorité religieuse se faisant réprimander par un employé de l'État portant fièrement une croix à son cou pourrait penser être discriminé en raison de ses croyances? À la Commission des droits de la personne, on affirme donc être contre une hiérarchisation des droits, mais de facto on juge, sans réelle justification, que l'expression religieuse des employés a priorité sur l'expression politique.
Des questions, des questions et encore plus de questions
La Commission s'attaque également au projet de Charte du gouvernement du Parti québécois par rapport aux termes utilisés. La Commission s'inquiète de la portée juridique des mots et des expressions contenus dans le document gouvernemental. Souvenons-nous que le projet de loi du gouvernement n'a pas encore été déposé. Ce projet de loi sera rédigé par une équipe d'avocats travaillant pour différents ministères, contrairement au document diffusant les grandes orientations du projet péquiste. Ainsi donc, la Commission des droits de la personne s'insurge contre les termes utilisés dans un document visant à informer le public, alors que le projet de loi n'a même pas été déposé. On peut donc se demander pourquoi la Commission a décidé de déchirer sa chemise sur des détails techniques avant même le dépôt du projet de loi. On peut donc en conclure que la sortie virulente de la Commission visait davantage à nuire au gouvernement qu'à réellement analyser le projet sur une base technique.
Une nouvelle religion
La position de la Commission revient essentiellement à dire : le gouvernement ne peut pas instaurer une Charte de la laïcité, car ce changement entrerait en opposition avec la Charte des droits et libertés actuelle. Mais voilà, le gouvernement souhaite justement modifier la Charte des droits et libertés de la personne, notamment au niveau de la hiérarchisation des droits et de la laïcité de l'État. Cette même Charte des droits et libertés de la personne a été adoptée en 1975 par les élus du Québec. Pourquoi, en 2013, les élus ne pourraient pas modifier cette même Charte ou même en adopter une nouvelle? Cette opposition au changement simplement pour s'opposer au changement démontre l'état d'esprit des membres de la Commission : pour ceux-ci, les chartes actuelles (canadienne et québécoise) sont l'équivalent de bibles, intrinsèquement parfaites. Ils ont passé leur vie à les étudier et à travailler en se basant sur celles-ci. Elles ont donc acquis un caractère sacré et intouchable, comme si les élus de l'époque avaient reçu la visite d'un dieu pour leur rédaction comme Moïse reçut les dix commandements.
Mais voilà, comme de nombreux cas l'ont démontré, la Charte québécoise des droits et libertés de la personne n'est pas parfaite et ne pourra jamais l'être. Pourquoi les politiciens d'aujourd'hui n'auraient-ils pas le droit de les modifier? N'est-ce pas contraire à la démocratie que de permettre qu'une loi ou une constitution, adoptée par des politiciens ayant leurs propres préférences, soit immuable? Pierre-Elliott Trudeau l'avait compris en imposant sa Charte sans référendum tout en imposant par la suite un lourd processus démocratique pour l'amender, dans le but évident d'imposer pour longtemps sa vision et sa politique. Au Québec, heureusement, personne n'a verrouillé la Charte à double tour et les politiciens ont le devoir de constamment repenser notre système dans le but de l'améliorer. Rien n'est parfait et la position de la Commission des droits de la personne est fortement critiquable puisqu'elle démontre que son interprétation de la Charte des droits et libertés de la personne est devenue une véritable religion!
Mosquée Assuna de Montréal
La mosquée Assuna Anabawiya de Montréal, qui serait sous la loupe du Pentagone et du SCRS, car soupçonnée d'être reliée à Al-Qaeda, a récemment fermé son site web. Comme plusieurs opposants à la Charte des valeurs affirment aussi que le voile n'est aucunement sexiste, il semblerait que la mosquée ait cru bon d'effacer son site le temps que le débat se fasse. Sur celui-ci figurait une section intitulée « L'obligation de baisser son regard ». Heureusement pour nous tous, il existe des sites qui se chargent s'archiver le web, nous permettant ainsi de consulter à nouveau les propos sexistes et dégradants véhiculés par cette mosquée. Voici un passage (très) évocateur
No hay comentarios.:
Publicar un comentario